Le fantôme et les deux âmes égarées qui traînent encore par
ici l’auront sûrement remarqué : ce blog a été entièrement nettoyé. Il en
avait bien besoin : trop de selfies, trop de banalités pour mériter son
nom. Je ne dis pas que ma tendance à l’apitoiement et aux coups de gueule
inutiles va cesser. On a tous ses défauts. Et puis, il faut bien avouer que les
articles qui récoltaient le plus de commentaires par ici concernaient :
1 – Rammstein (fanatisme exacerbé caché derrière un souci
encyclopédique de compiler tout ce qui se dit sur le groupe)
2 – mon boulot de prof débutante (apitoiement puissance
1000)
3 – mes anecdotes teintées de politique made in café du coin
de la rue (coups de gueule féministes et gauchisants)
Je ne dirais pas que cette époque est entièrement révolue.
Disons simplement que j’ai vieilli ; que je passe donc de moins en moins
de temps sur Internet par plaisir ; que la manière dont je tenais ce blog
nécessitait une mise à jour régulière ; qu’il a été concurrencé par
d’autres monstres sur blogger que j’ai moi-même créés ; que je n’ai plus
le temps de tous les mettre à jour au même rythme effréné. Et que même mes
idées politiques ont évolué !
Ce blog, qui a 6 ans désormais, n’a jamais eu de ligne
directrice, de grand thème à suivre, et n’en aura probablement jamais.
D’ailleurs, il subira sûrement un nouveau remaniement dans 6 ans, remaniement
bien inutile pour les hackers qui retrouvent tout – mais les hackers me
laissent indifférente et ça sera probablement réciproque. Je crois toujours
qu’il est impossible de préserver son anonymat sur Internet et que le meilleur
moyen de battre Big Brother est d’abreuver la Toile d’infos sur soi, vraies,
fausses et inutiles en proportions équivalentes. Le nettoyage de ce blog est
donc surtout symbolique pour moi : il me force à adopter l’attitude de la
prof qui entame une nouvelle année scolaire, dans un nouvel établissement, avec
de nouveaux élèves et une nouvelle équipe.
Depuis la rentrée, je suis affectée dans la région
parisienne, après deux années de stage en province. Ne comptez pas sur moi pour
vous dire dans quelle petite ville je tisse ma toile, ni où j’enseigne (en tant
que TZR, ça change tout le temps de toute façon). Mes propos sur ce blog
pourraient très bien se révéler peu « éthiques et responsables. »
D’ailleurs, je commence fort : j’envisage de
démissionner. Oui, après seulement deux ans d’enseignement. Seul mon prêt à
rembourser m’en empêche. Je démissionnerai donc. Peut-être dans deux ans,
peut-être dans 5 ans… La vocation, je ne l’ai peut-être jamais eue et ce n’est
plus ce qui amène les jeunes à enseigner de nos jours. Au mieux, ils ont ce
maigre espoir (tout rachitique, l’espoir, hein) que le métier de prof inclut
encore 20% d’enseignement. Je dis au mieux, parce qu’au pire, le chômage des
jeunes et les erreurs de parcours dans les études sont là pour enfoncer le
clou.
Les jeunes profs chevronnés, ceux qu’on dit être les
meilleurs profs, ceux qui sont réunis en ZEP (veuillez désormais les appeler
REP, REP+ et autres…), ne sont là que pour récolter les points APV et se
barrer.
« Il faut que tu abandonnes l’idée de faire
cours, » me dit un collègue PP (prof principal – l’Education Nationale est
un monde de sigles). « Minimum 3 mois. Peut-être toute l’année…. »
Je suis TZR, je lui rappelle. Ça veut dire que je vais subir
insolences, bagarres, et jets de gomme (sur élèves et sur moi-même) toute
l’année peut-être pour…rien. Si encore ce baptême du feu permettait d’être
mieux armé, ce serait génial. Mais même pas. La carapace ne devient pas plus
épaisse ; elle s’effrite, et les meilleurs profs colmatent les fissures
par du cynisme ; les autres partent en dépression.
L’explication fournie par les « anciens » d’une
ZEP est toujours la même : une fois que les élèves te connaissent, ça se
passe mieux.
« Les élèves en zone difficile fonctionnent beaucoup à
l’affectif… » Certes, mais je ne suis pas formée pour remplacer leur
maman. Je remplace leur prof qui n’a
jamais pris son poste. Je sais que le prof a aussi la fonction d’éducateur –
l’imbécile ultra formaté que j’avais comme inspecteur l’an dernier me l’a
suffisamment rappelé – ce concept est très bien ancré dans mon cerveau ;
je crois désormais que les profs enseignent pour 20% et éduquent pour 80%. Mais
les profs en France ne sont pas formés pour ce qui correspond à 80% de leur
boulot et doivent subir des baptêmes du feu répétés pendant leur début de
carrière avec la conviction que dans 5 ans, avec un PACS et quelques
bonifications de points, ils obtiendront leur mutation dans un établissement un
peu plus sympa, près de leur famille et/ou amis.
Non, pas avec la conviction qu’ils soient capables d’éduquer
des ados un jour. Pour avoir déjà testé une ZRI (zone rurale isolée), un lycée
huppé et une ZEP classée violence, je peux vous garantir qu’aucun prof ne sait
éduquer d’autres gamins que les siens.
« Oh ! tu sais, si un gamin t’emmerde en cours, tu
appelles ses parents. Tu verras, il y en a dont le père est connu pour être
violent et le gamin se prendra une raclée, c’est pas cool, mais au moins, il te
fichera la paix un temps. »
Heu, non. Je suis cynique, mais pas à ce point.
Comment fais-je donc pour survivre à ces 2 ou 5 années que
je me donne ? Je m’inscris pour la quatrième fois à l’agrégation et je
prie pour qu’Oscar Wilde et ses bons mots apportent mon salut. L’agrégation,
c’est 100 points de gagnés. Non seulement ça ne se refuse pas, mais cela
devient nécessaire lorsque je vois que les académies que je vise deviennent de
plus en plus « chères » en points lors des mouvements.
Je réfléchis aux portes de sortie : enseigner à
l’étranger n’est pas forcément plus simple ; obtenir un poste en lycée
français à Londres ou Berlin, ça fait rêver jusqu’à ce qu’on comprenne que le
salaire change peu (enfin, pour Londres, l’indemnité est conséquente, mais la
concurrence est rude). Reste la reconversion, mais avec une formation aussi
débilitante, l’enseignant n’est pas la priorité des employeurs. Il faut dire
que la formation d’un enseignant est simple. N’importe quel bon élève s’y
complaît. Elle te donne un aperçu sur un monde merveilleux où ne règne que la
connaissance ; où les sciences, l’art et la littérature portent une
majuscule alors qu’ailleurs, ils ne sont que de vagues prétextes pour enculer
les mouches ; et surtout, où les jeunes enseignants sont exclus à moins
d’avoir une carte de parti, le statut d’agrégé et une forte tendance à flatter
les gens.
Je sens que mes propos deviennent bien acerbes, mais
n’oublions pas que c’est le diable qui parle ici. Point de Vérité dans ma Voix.
Ce blog n’a de sens que si j’y étale le mal-être et la mauvaise humeur cumulés
dans les heures de trajets en RER et bus bondés, dans les heures de cours sans
véritable contenu.
Je ne sais pas à quoi tu t'attendais,tes année lycée /collège ne remonte pas si loin que tu ne te souvienne de comment sont les ados.
RépondreSupprimerSinon bien vu d'avoir effacé tes premier articles , c'était quant même un peut trop intime pour risquer de voir tes élèves tomber dessus ,
les gamins sont pire que des hyènes inutile de leurs donner matière à .. .Je te souhaite bien du courage ,bye ;) [ stuka ]